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AUSTRALIE : DÉTENTION ARBITRAIRE DES MIGRANTS ILLÉGAUX GEMA ET ZACKARIA CHOL

  • ILAAD
  • 10 févr.
  • 6 min de lecture

La Ligue internationale contre la détention arbitraire exhorte le Gouvernement australien à prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre en oeuvre l’avis n° 71/2023 du Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire concernant Gema et Zackaria Chol, en demandant au Gouvernement australien de les libérer immédiatement et sans condition et de leur accorder un droit exécutoire à réparation et indemnisation, en conformité avec le droit international.


Lire l'intégralité de l'avis du GTDA concernant Gema et Zackaria Chol (Australie) : Avis No. 71/2023.


ARRÊTÉ ET DÉTENU ARBITRAIREMENT SUR LA BASE DE LA LOI DE 1958 SUR LES MIGRATIONS


Gema et Zackaria Chol sont des frères sud-soudanais nés respectivement en 1986 et 1990. Ils sont arrivés en Australie en 2003 avec leur mère et trois membres de leur fratrie, munis de visas humanitaires de réfugié. À la suite d'une condamnation pour voies de fait aggravées et coups et blessures volontaires, leurs visas respectifs ont été annulés en octobre 2014 et 2015, alors qu'ils purgeaient des peines de prison.


En octobre et en juin 2015, après leur libération de prison, ils ont tous deux été immédiatement placés en détention administrative en application de l'article 189 de la Loi de 1958 sur les migrations, qui impose la détention des non-ressortissants sans visa. En octobre 2016 et février 2017, ils ont respectivement demandé un visa de protection, qui leur a été refusé dans les deux cas. Au moment de la communication de la source, Gema Chol était détenu au centre d'accueil des migrants en transits de Melbourne, à Broadmeadows, tandis que Zackaria Chol était détenu au centre de détention d’immigrants de Yongah Hill, à Burlong. Il convient de noter que la détention administrative de Zackaria Chol a été divisée en plusieurs périodes, la dernière ayant commencé en juillet 2022.


Bien qu'il ait eu la possibilité de le faire, le Gouvernement australien n'a pas répondu dans les délais impartis. Par conséquent, le Groupe de travail a examiné le cas avec les informations dont il disposait, sans la réponse du Gouvernement.


Tout d'abord, rappelant une vingtaine de cas antérieurs et similaires de détentions arbitraires en Australie, le Groupe de travail a rappelé sa position constante concernant la Loi de 1958 sur les migrations au cours des dernières années. Il a notamment rappelé que cette loi ne respectait pas le droit de demander l'asile et imposait à tort une détention obligatoire de facto à tous les migrants, alors que la privation de liberté dans le contexte de l'immigration ne devrait être qu'une mesure de dernier recours.


Le Groupe de travail a déclaré qu’une législation nationale contraire au droit international des droits de l’homme, ne saurait être acceptée comme fondement juridique justifiant la détention. Le Groupe de travail a donc exhorté le Gouvernement australien à revoir et à modifier d'urgence la loi sur les migrations à la lumière des obligations qui lui incombent en vertu du droit international des droits de l'homme.


Étant donné l'inaction du Gouvernement malgré les nombreuses alertes des organes de l'ONU concernant cette loi, et compte tenu de l'utilisation de cette loi comme base de la détention de Gema et Zacharia Chol, le Groupe de travail a conclu que leur droit de ne pas être détenus arbitrairement, consacré par l'article 9 (1) du Pacte, avait été violé. 


Par conséquent, le Groupe de travail a considéré que les détentions de Gema et de Zacharia Chol étaient arbitraires au titre de la catégorie I, car dépourvues de base juridique.


DÉTENTION POUR UNE DURÉE DE FACTO INDÉTERMINÉE EN RAISON DE LEUR STATUT D'IMMIGRANT 


Gema et Zackaria Chol ont tous deux été placés en détention administrative sur la base de la Loi de 1958 sur les migrations. Comme l'a noté le Groupe de travail, des migrants ne peuvent être placés en garde à vue ou en détention administrative dans le cadre de procédures d’immigration qu’à titre exceptionnel, en dernier recours, pour une période aussi brève que possible et  à des fins légitimes. 


Dans les deux cas, étant donné l'absence d'indication sur la date à laquelle leur détention respective pourrait prendre fin, il semble que leur détention soit sans fin. Plus précisément, au moment de la communication de la source, Gema Chol était détenu depuis plus de huit ans, tandis que Zackaria Chol était détenu, cumulativement, depuis au moins trois ans.


Dès lors, le Groupe de travail a considéré que leur détention résultait de l'exercice légitime de leur droit de demander l'asile, protégé par l'article 14 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, et qu'il s'agissait donc d'une violation de ce droit. En outre, le Groupe de travail a rappelé le droit des frères Chol à la liberté et à la sécurité de leur personne consacrés par l'article 9 du Pacte, et a souligné que ce droit aurait dû leur être garanti sans distinction aucune, comme l’exige l'article 2 du Pacte. Par conséquent, à la lumière des circonstances susmentionnées, le Groupe de travail a estimé que leurs droits au titre de l'article 2 et de l'article 9, paragraphe 1, du Pacte avaient également été violés.


Il en résulte que le Groupe de travail a estimé que leur détention était arbitraire et relevait de la catégorie II. Cette affaire a été transmise au Rapporteur spécial sur les droits humains des migrants. 


PRIVÉS DE LA POSSIBILITÉ DE CONTESTER LA LÉGALITÉ DE LA DÉTENTION


En outre, dans la mesure où leur détention est fondée sur leur statut migratoire et qu'elle est de facto illimitée, le Groupe de travail a souligné que leurs détentions respectives étaient de nature punitive. Ainsi, aucun d'entre eux n'a pu contester la légalité de sa détention devant un organe judiciaire, ce que le Groupe de travail a considéré comme constituant une violation de leur droit consacré par l'article 9 (4) du Pacte. 


Le Groupe de travail a donc estimé que leur détention était également arbitraire au titre de la catégorie IV.


DISCRIMINÉES SUR LA BASE DE LEUR STATUT MIGRATOIRE


Enfin, rappelant la décision de la Haute Cour dans l'affaire Al-Kateb v. Godwin, le Groupe de travail a noté que les non-ressortissants ne peuvent pas contester efficacement la légalité de leur détention administrative, alors que les citoyens australiens le peuvent. Sur ce point, le Groupe de travail a notamment rappelé que le Gouvernement australien n'a jamais expliqué par quel moyen les non-ressortissants pouvaient effectivement contester leur détention en cours pour respecter les articles 9 et 26 du Pacte. Il convient cependant de noter que par un arrêt rendu le 8 novembre 2023, la Haute Cour a annulé la décision qu’elle avait prise dans l'affaire Al-Kateb v. Godwin, autorisant désormais les non-ressortissants à contester leur détention administrative. Bien que le Groupe de travail ait salué cette décision attendue de longue date, il a fait remarquer qu'elle n'avait pas d'incidence sur la présente affaire. 


Par conséquent, le Groupe de travail a estimé que, puisque ni Gema ni Zackaria Chol ne pouvaient contester la légalité de leur détention en raison de leur statut migratoire, leur droit de ne pas faire l'objet de discrimination et d'être protégé contre celle-ci, consacré par l'article 26 du Pacte, avait été violé. Leur détention était ainsi arbitraire au titre de la catégorie V.


CONCLUSIONS DU GROUPE DE TRAVAIL DES NATIONS UNIES CONTRE LA DÉTENTION ARBITRAIRE


A la lumière de ce qui précède, le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire a estimé que les privation de liberté de Gema et Zackaria Chol étaient arbitraires et relevaient des catégories I, II, IV et V, car elle étaient contraires aux articles 2, 3, 7, 9 et 14 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et aux articles 2, 9 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.


Le Groupe de travail a demandé au Gouvernement australien de prendre les mesures nécessaires pour remédier sans délai aux situations de Gema et Zackaria Chol et les mettre en conformité avec les normes internationales pertinentes. Le Groupe de travail a estimé que, compte tenu de toutes les circonstances de l’affaire, la solution appropriée serait de les libérer immédiatement et de leur accorder un droit exécutoire à réparation, notamment sous la forme d’une indemnisation, conformément au droit international.


Le Groupe de travail a également demandé au Gouvernement de rendre sa législation, en particulier la loi de 1958 sur les migrations, conforme aux recommandations formulées dans le présent avis et aux obligations mises à la charge de l’Australie par le droit international des droits de l'homme.


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